Assez paradoxalement, quantifier de manière objective, la variabilité spatiale en agriculture de précision est un problème qui n’est pas simple. En effet, cette quantification requiert la prise en compte simultanée de deux composantes : la composante attributaire de la variable d’intérêt (par exemple est-ce qu’il y a une grande variation de rendement au sein de ma parcelle ?) et la composante spatiale de cette même variable (la variation de mon rendement est-elle organisée en grandes zones ou au contraire est-elle complètement aléatoire ?). On comprend bien que ces deux composantes doivent être prises en compte en même temps afin d’évaluer si une parcelle doit continuer à être traitée de manière uniforme ou non. En effet, une parcelle où la variabilité spatiale n’est pas suffisamment organisée (en zones) peut difficilement faire l’objet d’une gestion modulée, même si la variabilité observée est importante, de la même manière une parcelle où la variabilité spatiale est organisée en grandes zones mais où les différences sont faibles entre les zones peut justifier de conserver une gestion uniforme de la parcelle. Cette double quantification a conduit les scientifiques à proposer et à utiliser une grande diversité d’indices (ou combinaison d’indices) qui reposent sur des approches différentes. Chacun de ces indices présente donc des propriétés particulières, des limites, des avantages qui peuvent s’avérer plus ou moins pertinents en fonction des caractéristiques des données à traiter ou de la question posée. Aucun article scientifique n’avait jusqu’à aujourd’hui proposé de recenser, de décrire et d’évaluer sur un même jeu de données, les propriétés des différents indices proposés dans la littérature. Deux chercheurs de Montpellier (Montpellier SupAgro et SMAG) viennent de publier un article scientifique de review proposant ce travail. Plus de 60 articles scientifiques traitant de la quantification de la variabilité spatiale en agriculture de précision ont été analysés. Cette analyse a permis de mettre en évidence la grande diversité des indices proposés dans la littérature et d’en expliquer, pour chacun le principe. Cette analyse a mis en évidence des origines disciplinaires différentes, en particulier certains indices sont issus de la statistique classique alors que d’autres sont issus de la géostatistique, d’autres enfin sont issus de l’analyse d’images (morphologie mathématique) ou de la logique floue etc. L’article passe au crible chacun de ces indices et en évalue les propriétés. Il évalue également la facilité de mise en œuvre, que ce soit à travers la disponibilité des logiciels qui en permettent le calcul ou à travers une possible automatisation. Il propose finalement un arbre de décision qui permettra au praticien de choisir la meilleure approche possible (et la plus pertinente) en fonction du contexte de l’étude et des caractéristiques du jeu de données.

Référence : Leroux, C., & Tisseyre, B. (2018). How to measure and report within-field variability: a review of common indicators and their sensitivity. Precision Agriculture, 1-29